Page:Yver - Les Sables mouvants.djvu/171

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son corps. Sa bouche s’entr’ouvrait habituellement sur de grandes dents inégales. Ses yeux très clairs semblaient ne penser à rien. Chaque après-midi, elle allait dessiner d’après l’antique, à la grande galerie des Beaux-Arts. Certaines nuits, elle travaillait dans l’atelier de sa mère jusqu’à deux heures du matin. Et en tout cela, elle avait l’air d’un automate.

Son admission même, qui pétrifiait d’étonnement les siens, parut la laisser indifférente. François qui, en octobre, avait échoué pour la seconde fois à son baccalauréat, lui lança pour toute félicitation :

— Tu t’en moques, hein ! Tu as bien raison, ma pauvre fille. Mieux vaudrait dix mille francs de rente.

Marcelle dit seulement :

— Je vais aller prévenir mademoiselle Darche ; d’autant que je ne l’ai pas vue depuis quinze jours.

C’était un soir de mai. Dès le dîner, elle partit. Il faisait nuit quand elle arriva à l’appartement de l’avenue Kléber. La femme de chambre eut un air singulier pour lui dire que mademoiselle étant souffrante, ne la recevrait peut-être pas.

— Demandez-le lui toujours, fit la jeune fille, flegmatique.

Une minute après, elle fut introduite dans l’atelier qu’elle aimait tant, si clair avec son illumination électrique, ses boiseries blanches, et les