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Page:Yver - Les Sables mouvants.djvu/231

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Et elle le suivit de cet air béatifique qui la rendait méconnaissable.

Quand ils se retrouvèrent encore une fois en tête à tête dans le grand atelier inondé de lumière, Nicolas prit Marcelle dans ses bras.

— Maintenant que je suis à toi, lui dit-il avec une ferveur qui faisait trembler sa voix, il faut que je te livre tout le secret de ma vie d’artiste ; tu me verras travailler comme tu l’as désiré, Marcelle : tu connaîtras mes transes et mes joies ; tu connaîtras mon œuvre informe et imparfaite ; je t’associerai à mes rêves.

Puis la serrant avec un frémissement fou :

— Et tu auras un grand talent ; je veux que tu sois une divine artiste. Tout ce que je sens, je le ferai passer en toi. Tu es en même temps mon amante et mon élève, Marcelle.

Elle répondit :

— Je ne voudrais plus d’autre maître que toi.

Alors il la mena devant l’immense esquisse où les silhouettes se découpaient en noir sur la toile blanche. Là, il se mit à conter le sujet de son tableau. À gauche, sur une pente gazonnée, s’était répandue la foule, tout entière orientée vers Jésus, suspendue à ses lèvres. Au premier plan, un peu à gauche, se tenait le Sauveur avec ses disciples. Tous ces pauvres gens mouraient de faim, et ils n’y pensaient même pas. Heureusement que le Sauveur veillait sur eux. Et c’était