Page:Yver - Les Sables mouvants.djvu/239

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en silence, curieuses l’une de l’autre et se tenant pourtant sur la réserve comme deux femmes qui s’ignorent mutuellement. Mais dès le lendemain, Hélène, qui pressentait en Marcelle une jeune fille totalement différente d’elle-même et comme un monde nouveau où il lui tardait de pénétrer, commença de se livrer personnellement pour obtenir des confidences. Elle parla de Saintes, des histoires de la ville, puis de sa propre enfance, et même du goût qu’elle avait eu, à seize ans, pour un jeune docteur dont elle avait attendu vainement une demande en mariage. Mais Marcelle, qui n’était à la maison qu’un corps sans âme, toujours absente, ne pensant qu’à Nicolas, écoutait sa sœur avec indifférence, répondait par des mots distraits, plus impénétrable et taciturne que jamais.

— Voudrais-tu te marier ? lui demanda Hélène ingénument.

— Moi ! répondit Marcelle avec un frémissement de tout son être, je ne me marierai jamais. Ce jour-là, Houchemagne venait dîner chez les Fontœuvre. Il arriva très ému. Un télégramme lui avait appris la mort de M. de Cléden. Les Fontœuvre connaissaient peu cet oncle très casanier, qu’on ne voyait qu’à de rares intervalles ; mais ils aimaient tendrement la charmante Jeanne et s’affligeaient de son deuil. Jenny insinua même :

— Comme elle doit souffrir, seule, là-bas !…