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Page:Yver - Les Sables mouvants.djvu/275

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Et afin de ne pas voir les amants s’éloigner ensemble, Hélène s’enfuit dans sa petite chambre, où elle put cacher les larmes intarissables de son premier désenchantement.

— Hélène m’excède, dit Marcelle à Nicolas dans la rue ; depuis son retour elle m’espionne, et je sais maintenant qu’elle a deviné notre amour.

— Comment l’aurait-elle su si tu n’en as rien dit ?

— Ah ! tu ne connais pas Hélène !

Cette pensée assombrit le début de leur fête. Mais leur fête était trop magnifique et trop ardente pour ne pas noyer tout souci dans sa lumière. Quand ils se virent dans le train, seuls dans leur compartiment, ils eurent un moment d’ivresse enfantine, presque populaire. Elle le traitait en compagnon de jeu ; lui la taquinait comme il eût fait d’une grisette. Elle n’interrompait son rire que pour demander :

— Est-ce bientôt Triel ?

Enfin la Seine apparut et le train côtoyait sa rive droite ; on la voyait fuir au loin vers une région brumeuse et bleuâtre. Ses bords et ses îles portaient des peupliers abondants ; et une atmosphère légère et tendre régnait sur toute cette campagne sereine, fleuve, champs et bois, déjà touchés par l’automne. Alors Marcelle et Nicolas devinrent attentifs à la nature dans laquelle ils pénétraient. Leur rire cessa. Ils ne se parlèrent plus, penchés vers la portière, les mains serrées, assagis et pensifs.