Page:Yver - Les Sables mouvants.djvu/276

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Il la regardait avec émoi. Elle jouissait de se sentir admirée, elle en palpitait de plaisir comme une fleur dont on respire le parfum.

— Ah ! que je suis heureuse ! soupira-t-elle oppressée. Que va-t-il donc nous arriver aujourd’hui ?

— Oui, que va-t-il nous arriver aujourd’hui ? reprit Nicolas très grave.

Ils descendirent à la petite gare proprette et minuscule, enfilèrent une allée de platanes si taillée, si régulière, si bien environnée de villas luisantes qu’on se serait cru dans un jardin de riches bourgeois. Mais déjà l’église se montrait entre les arbres, d’une architecture diverse et tourmentée, avec son toit vétuste et la coiffe noire de son clocher en pyramide. Et, tout alentour, les très vieilles maisons de l’ancienne ville se massaient d’un air de dévotes personnes qui s’accotent à la grande Protectrice. Alors, Nicolas fut pris d’une indéfinissable émotion en amenant à ces lieux familiers son tragique amour. Ces vieilles rues, ces murs décrépits, ces façades grignotées par le temps qui l’avaient connu tout petit et pur, faible et paisible, il leur revenait aujourd’hui avec son adultère. Il avait trompé la plus noble des femmes, et il serrait contre lui cette fragile maîtresse qui aurait pu être son enfant. Pourtant, ce n’était pas de honte qu’il frémissait, c’était d’un bonheur éperdu.