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Page:Yver - Les Sables mouvants.djvu/348

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et las, et jeta un regard distrait sur les gazelles, les jeunes veaux aux taches rousses, les percherons gris aux croupes rondes qui garnissaient la muraille. Aussitôt, le vieux Vaugon-Denis, qui l’avait aperçu, le rejoignit, empressé. Il n’était pas seul. Addeghem et Vaupalier l’accompagnaient. Ce furent des exclamations quand on serra la main d’Houchemagne. Mais que devenait-il donc ? on ne le voyait plus ! Et on le dévisageait comme les hommes fameux qui ne prodiguent pas leur présence. Lui s’expliquait avec un sourire de timidité. Il était devenu très casanier. Il s’était enfermé de longs mois avec son œuvre ; même il n’avait pas quitté Paris de tout l’été.

Les deux vieillards l’écoutaient complaisamment le marchand de tableaux, qui se vantait de l’avoir fait, le critique vaniteux qui revendiquait l’honneur de l’avoir rendu Européen. Tous deux hochaient la tête comme devant un personnage qu’on a connu petit enfant et qui vous a un jour dépassé. Vaupalier qui, tout en émettant des réserves quant à son genre, reconnaissait à Houchemagne de la force et de l’adresse, l’examinait avec moins de religion et plus de curiosité ; car aujourd’hui, peintre officiel, décoré, arrivé, il jalousait toujours l’immense et mystérieuse supériorité de l’idéaliste. Frêle et menu comme autrefois, d’une correction de mise exagérée depuis qu’il était devenu l’amant de Nelly