Page:Yver - Les Sables mouvants.djvu/361

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— Oh ! j’ai tant prié Dieu qu’il t’arrache à cette femme !

Et Nicolas se mit à souffrir de cette phrase comme d’une menace terrifiante. Avait-elle fait cela ? et si elle l’avait fait ne serait-elle pas exaucée, elle qui était une sainte ? Était-il invraisemblable qu’il fût un jour séparé de Marcelle ? Que d’événements imprévus pouvaient survenir pour accomplir entre eux ce qu’ils n’avaient pas eu le courage de faire jusqu’au bout !

« Oh ! perdre Marcelle ! » pensait-il en frissonnant de douleur.

Et il en voulait maintenant à Jeanne dont il s’était un moment rapproché tout à l’heure.

D’ailleurs, nulle entente durable n’aurait su désormais s’établir entre eux, et, malgré les objurgations de sa femme, dès le lendemain, il reprit l’étude de blonde qu’il eut terminée aux premiers jours de novembre. Il travaillait sans honte, et même avec une sorte de paix, comme si l’humiliation d’aller à l’encontre de son rêve eût été la rançon de son péché. Sa seule pudeur en cela était de cacher soigneusement la toile les jours où Marcelle venait à l’atelier. Alors, il lui montrait silencieusement l’invariable état de ses grandes études arrêtées. Mais aujourd’hui, la grave Marcelle ne se réjouissait plus des ravages qu’elle avait apportés dans la vie de l’artiste. Ils l’effrayaient et l’attristaient davantage à mesure que l’amour, l’élevant au-dessus de son égoïsme, en faisait une