Page:Yver - Les Sables mouvants.djvu/370

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son tour lui tendre sa joue ; toutes deux, sans se le dire, pensaient à Nicolas. Quand la jeune femme eut relevé sa voilette par-dessus son grand chapeau noir, on la vit très pâle et émaciée ; et Addeghem jurait tout bas d’admiration devant ce profil qui se découpait si blanc, si pur, sur le fond sombre du chapeau. Alors, on parla de son mari ; toutes les curiosités qu’Houchemagne n’avait jamais cessé d’éveiller, se déchaînaient en présence de sa femme. Où se terrait-il, qu’on ne le voyait plus ? Quel secret cachait-il encore ? Comment se portait-il ?

— Ah ! soupira Jeanne, il m’inquiète ; je le trouve si fatigué ! Voyons ! s’écria Nelly Darche, ce n’est tout de même pas indiscret, puisque nous touchons au Salon, de vous demander ce que sera son envoi. Nous conduira-t-il encore au ciel ou bien sur la terre, cette fois ?

Le visage de Jeanne eut une petite contraction de souffrance. Elle endurait un martyre. Il fallait pourtant bien en venir à l’aveu de la vérité. Mais qu’aurait-elle donné, elle qui aurait voulu tous ces peintres aux pieds de l’Idole, pour n’avoir pas à leur dire l’impuissance où le grand artiste était tombé. Elle fit un effort et prononça :

— Je crois qu’il ne sera pas prêt pour cette année, qu’il n’enverra rien du tout.

Alors ce furent des exclamations, des cris d’étonnement, des simulations de regrets. Com-