Page:Yver - Les Sables mouvants.djvu/401

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fut pour Jeanne comme un coup dans une plaie vive. Elle se rapprocha du vieil Houchemagne.

— Ah ! père, murmura-t-elle en posant son beau front de patricienne sur l’épaule du paysan, je l’aimais tant !

Alors le vieux se mit à pleurer, et il entourait Jeanne de ses mains hésitantes et tremblantes, comme s’il avait enlacé un être sacré.

Ils le veillèrent tous deux ainsi jusqu’à l’aube ; et le sommeil de Nicolas ne fut pas même interrompu. L’espoir leur revenait. Et le réveil aussi fut excellent. Le malade prononça en voyant Jeanne :

— Ma chère femme !…

La présence de son père l’illumina. Il prit la main calleuse du vigneron et l’embrassa plusieurs fois. Le vieux disait :

— Allons, ça va mieux aller, hein ! faut se guérir, mon gâs !

Quand le père Houchemagne fut allé se reposer, Nicolas appela sa femme et lui montrant le Christ inachevé :

— Je désire que tu donnes cela à la pauvre petite Marcelle. Tu lui diras que j’ai voulu… lui laisser ce souvenir…

Jeanne le promit distraitement, s’effrayant à ce moment de l’expression étrange et nouvelle des yeux du malade. Au bout d’une minute, il articula encore ;

— Ne l’abandonne pas…