Page:Yver - Les Sables mouvants.djvu/402

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À neuf heures du matin, trois médecins arrivèrent pour une consultation et fatiguèrent beaucoup Nicolas. Ils s’obstinaient à cataloguer la maladie dont mourait le grand artiste, à faire rentrer son cas dans des cadres communs et, ne pouvant le sauver, voulaient au moins pouvoir nommer son mal. Mais tous trois différaient d’avis ; d’ailleurs, tous les indices les déroutaient. Enfin, on s’entendit sur la grippe infectieuse, et cet accord parut les satisfaire beaucoup.

Nicolas semblait sommeiller. Pourtant on l’entendit murmurer :

— L’Inconnu doit être si beau !…

Bientôt Jeanne reconnut à nouveau les indices d’une syncope : la lividité de la face, la révulsion des yeux, et cette chute de la tête en arrière qui est comme un glissement de l’être vers l’abîme ; elle recourut vite à l’éther : la syncope était douce, tranquille ; Jeanne fit deux piqûres, puis une troisième, et il lui sembla que le malade dormait. Ses mains se posèrent sur le cœur de son mari : il ne battait plus.

Pendant de longues minutes, le visage contre le visage du mort, elle prononça son nom : « Nicolas ! » tendrement, désespérément, comme lorsqu’on rappelle un être aimé qui veut vous fuir. Mais l’âme chérie ne revint pas…

Quand Marcelle, traversant le jardin, vint sonner, comme chaque matin et chaque soir, à