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Page:Yver - Les Sables mouvants.djvu/69

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Mais il y eut une scène épouvantable de Marcelle qui n’entendait pas rester seule avec Brigitte. Il fallait qu’on l’emmenât. Elle voulait aller voir les tableaux, elle aussi. Et c’étaient des trépignements, des pleurs, des cris furieux. La délicate figure d’enfant, si potelée, si fragile, aux rondeurs si tendres, était décomposée, et derrière les larmes apparaissait le masque d’une femme méchante. La mère fut bouleversée à ce spectacle. Elle finit par dire :

— Va demander à Brigitte de te mettre tes bottines fourrées et ton manteau de peluche.

— Comme tu la gâtes ! observa Jeanne.

Ils arrivèrent les premiers chez Vaugon-Denis. Ni leurs amis, ni personne n’étaient encore là. Enfilant un couloir, ils gagnèrent la salle d’exposition dans laquelle, de loin, on apercevait de la lumière. Ils entrèrent en silence.

C’était un vaste salon carré, tendu de rouge sombre. À droite et à gauche, les grands cadres d’or étincelaient sur la muraille ; mais, ce qui remplissait l’œil dès l’abord, c’était, en face de la porte, l’énorme forme blanche du Séraphin. Ce bel androgyne dépassait de beaucoup la taille humaine. On le voyait en marche, posant le pied en avant d’un mouvement fier. Une tunique dorienne l’habillait, serrée sous l’aisselle d’une cordelière et retombant en bouffants jusqu’à la taille ; rien n’était donc changé au céleste costume des légendes. Mais toute la magie de cet être