Page:Yver - Princesses de Science.djvu/102

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
92
princesses de science

véritable- dans cette maison qu’elle hantait autrefois de son ombre inquiétante, elle y entrait pour toujours, et la propriété du jeune homme sur elle commençait rien que de la voir ici.

— Comme le travail me sera bon près de vous ! dit Thérèse.

Elle jouissait d’attendre cette vie heureuse et complète dont cet appartement, si bien fait pour l’étude, symbolisait la belle ordonnance, avec sa bibliothèque, son large bureau d’acajou aux chimères dorées, son fauteuil de travail, puis le lit d’examen pour les malades, le microscope tout monté devant la fenêtre, et la porte complice, la porte favorable, s’ouvrant sur le cabinet voisin, qui permettait à l’étudiante l’appel murmuré vers son jeune mari… Tous ses rêves se réalisaient, et, par surcroît, celui qu’elle n’avait pas voulu faire. Elle serait la femme savante et célèbre, selon ses vœux, et, de plus, à ses heures, elle se délecterait dans cet amour qu’elle n’avait pas souhaité.

Et déjà elle se voyait docteur, recevant ici ses malades. Il existe, dans ces sortes d’audiences, une royauté morale qu’elle ambitionnait depuis sa prime jeunesse. Elle serait à son fauteuil de bureau, et de grandes dames lui amèneraient leurs enfants délicats, avec une humilité, une supplication inexprimées, tout ce qui passe dans les yeux de ceux qui souffrent, devant le mystérieux pouvoir du médecin.

— Thérèse, rappela discrètement Guéméné,