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princesses de science

perd ; aucun effort n’est stérile. À chacune de vos expériences, un peu de lumière jaillit dans ce qui était ténébreux ; à chacune de vos déceptions, le champ des erreurs se rétrécit, une voie fausse se ferme, la vraie route se dégage un peu plus, et tel résultat, même négatif, prend une portée immense… C’est beau, cette œuvre !

Il l’écoutait avec un étonnement délicieux glorifier ce grand labeur accompli depuis des mois, sans joie pour lui, sans réconfort, sans la parole amie dont tout créateur a soif. Elle lui versait en une seule fois tout ce dont il avait manqué depuis les débuts de ses travaux. Et, pour tout ce qu’il avait enduré dans sa solitude intellectuelle, voulant maintenant un dédommagement, il provoquait sa charité en exhibant, comme un mendiant qui montre ses plaies, tout l’arriéré de ses doutes, de ses transes, de ses découragements.

— Non, non ! Trouver, c’est le fait d’un hasard. Il y en a une légion qui cherchent, et un seul qui trouve : pourquoi serais-je celui-là ? J’ai perdu des heures et des heures encore à ce laboratoire de l’École. J’ai inventé des réactions chimiques qui n’ont servi à rien, et déterminé chez tout un peuple de pauvres petites bêtes des souffrances inutiles. Parce qu’aujourd’hui, grâce à trois cobayes, une démonstration semble se faire, à quoi suis-je avancé ? Ce n’est pas trois animaux qui peuvent servir à démontrer irréfutablement ma formule ; il m’en faut cent, il m’en faut mille ; il me faut dix