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Page:Yver - Princesses de Science.djvu/377

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princesses de science

Écoute, Fernand, lui dit-elle, très pâle, les yeux rougis, tu sais que je te pardonne tout et que je t’aime ; mais, après ce que nous avons dit ce soir, j’ai comme un reste de ma fierté anéantie qui se réveille. Je te suis soumise en tout, mon ami, mais permets, je t’en prie, permets que cette nuit je ne dorme pas près de toi.

Sans répondre, il fit un geste de douleur, de résignation, et la vit pénétrer dans la chambre voisine.

Le lendemain, dès le début de l’après-midi, la vieille servante de l’oncle Guéméné introduisait Thérèse dans le salon de la morte, où le portrait, par les larges baies ouvertes, plongeait ses beaux yeux passionnés dans les verdures du Luxembourg. Cette grande pièce, pareille à un reliquaire, conservait toujours dans un silence religieux le piano muet, le métier à broder, le fauteuil au pied duquel demeurait sur le tapis l’empreinte vague de deux pantoufles. Et Thérèse songeait à ce jour où elle était venue ici avec Fernand, aux premiers temps de leur mariage. Tous deux alors tremblaient de bonheur et d’amour rien qu’à se regarder. Le portrait les dominait superbement, figure d’idéale, d’impérissable passion. Et Thérèse l’avait enviée, cette femme mystérieuse, pour son pouvoir, son indéfinissable charme, le merveilleux roman qu’avait été sa vie amoureuse. Elle s’était dit : « Je veux une passion semblable. Je veux être aimée