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Page:Yves - La Pension du Sphinx.djvu/138

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« Si nous quittions cette salle à manger où il flotte des idées noires, mes enfants ! s’écria Mme de Bronchelles, venez donc. »

Elles s’acheminaient toutes vers le cabinet de travail où se passaient les soirées. Annette venait derrière. André Nouvel se trouva à ses côtés.

« Qu’avez-vous donc, pauvre enfant ? lui dit-il ; c’est le malheur de Mlle Bjoertz ? Mais voyez, elle vous donne l’exemple du stoïcisme.

— Que voulez-vous, murmura la créole, le visage enfoui dans son petit mouchoir, je suis faite comme cela ; je ne peux pas, je ne peux pas voir souffrir. Et Ogoth souffre, il faut qu’elle souffre bien cruellement pour avoir parlé comme elle l’a fait. Et puis aussi, je me reproche d’être heureuse quand les autres ne le sont pas.

— Vous ne serez jamais heureuse, vous, avec votre cœur. »

Elle l’écoutait parler dans une religion délicieuse, recueillant chacune de ses paroles comme des diamants ; mais c’était surtout cet ineffable sujet du cœur, qu’il mettait une sorte de coquetterie de littérateur à aborder près d’elle, qui faisait vibrer sa petite âme amoureuse. Elle sentait plus que jamais dans Nouvel l’auteur de Martiale,