Page:Yves - La Pension du Sphinx.djvu/181

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Elle s’arrêta devant la porte de la créole, serra la lampe contre son étroit corsage, le temps qu’elle frappait, puis, comme on ne répondait pas, elle entra résolument, la tête tournée vers le lit où elle croyait trouver Annette. Mais Annette n’était pas couchée. Un châle épais jeté sur sa frêle robe du soir, elle avait ouvert la fenêtre, et là, à demi plongée dans les ténèbres d’un noir d’encre, son front trop chaud baigné des fraîcheurs d’une nuit d’hiver humide, elle achevait le rêve commencé là-bas. Entendant entrer, elle s’était retournée d’un geste brusque.

« Oh ! Vittoria ! êtes-vous malade, pauvre petite ? s’écria-t-elle, le cœur soudain saisi d’une détresse inconsciente à la vue de l’Italienne.

— Merci, je me porte bien, Annette, répondit Vittoria ; c’est pour vous parler que je viens.

— J’ai eu peur, voyez-vous ; d’ailleurs vous paraissez souffrante, vous êtes blanche comme un cierge : prenez un peu de cela… »

Et elle lui tendit, en entr’ouvrant ses doigts, une orange mi-ouverte dont le jus attiédi jeta un parfum dans la chambre. Mais Vittoria secoua la tête.

« Je ne pourrais pas, merci ; du reste il faut que je vous dise vite ce qui m’amène ; je ne voudrais