Page:Yves - La Pension du Sphinx.djvu/188

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de révéler cet organe timide et atrophié qu’était son cœur.

Un instant encore, Annette demeura à genoux, les mains jointes dans un geste de désespoir juvénile navrant ; de temps en temps, un sanglot secouait son petit buste délicat, serré dans cette robe de soirée si fraîche et si gaie qui était une telle ironie maintenant. Puis des larmes plus pressantes recommencèrent à sourdre sous ses sombres longs cils et elle voulut congédier Vittoria, car ce n’était pas vers elle que tendait son immense besoin de dire sa peine, de se confier. Le service si équivoque que venait de lui rendre la signorina n’était pas de ceux qui se payent de confiance et de sympathie. Sa vue lui était plutôt pénible. Elle lui dit :

« Je vous remercie de m’avoir prévenue : vous l’avez fait pour mon bien ; maintenant, descendez, Vittoria, il est tard. »

Et Vittoria descendit, sans que sa compassion eût osé paraître. Elle n’avait pas su dire les consolations qui lui étaient venues aux lèvres ; elle avait hésité à donner à la quarteronne ce baiser des jeunes filles, si délicat, si fin et si doux, dont elle avait l’intime désir. Seulement, en bas, seule dans sa chambre, elle prit sa figure dans ses mains,