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Page:Yves - La Pension du Sphinx.djvu/194

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cherchait des excuses maintenant à la conduite de Nouvel.

« C’est bien simple qu’il ne m’aime pas, murmurait-elle en elle-même, très humble ; j’étais pour lui une curiosité, un visage comme on n’en rencontre pas ici. Mais je tiens à une race qu’on dédaigne tant !… ma grand-mère a été vendue douze cents francs sur le marché de la Pointe-à-Pitre, et j’aurais voulu que ce Parisien, savant et génial, eût un peu d’amour pour moi, moi qui ai dans les traits la ressemblance de cette pauvre vieille négresse, la chère aïeule méprisée, que ma mère me menait voir en cachette, et qui n’osait que baiser mes petits pieds d’enfant… Mon Dieu ! puis-je lui en vouloir ? Je ne suis pas une vraie blanche ; il sentait une différence entre son sang et le mien ; je pouvais l’aimer, moi, mais lui, non… »

Seulement la pensée de sa fortune, qui avait remplacé dans l’esprit de l’écrivain l’amour absent, lui revenait comme un cauchemar. Oh ! cette France, où on la renierait dans le fond des cours, mais où son argent lui ferait quand même la première place, qu’était-elle venue y faire ! Des images lui revenaient de son pays, de ces champs de cannes qui bruissaient au souffle du vent, de ces terres prodigieuses de fécondité, d’où sortait une végéta-