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Page:Yves - La Pension du Sphinx.djvu/206

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çait à poindre de terre dans les lames vertes de l’herbe première, elle ne pensait plus à recueillir les parfums agrestes qu’elle était venue chercher, uniquement occupée désormais de cet enfant qu’elle voulait sauver. Elle se rappelait tristement les paroles qu’André Nouvel avait prononcées l’autre jour dans une émotion de dilettante plus factice que profonde : « Imaginez ce petit corps difforme, disloqué, et si atrophié, que le petit cercueil qu’il lui faudra n’aura pas besoin d’être plus grand que cela. » La mort n’était pas venue ; il n’avait pas fallu de petit cercueil, Nouvel s’était trompé, et peut-être se trompaient-ils tous, ceux qui n’accordaient qu’une vie brève et maladive au pauvre petit si bien fait pour vivre. Il semblait impossible à la naïveté de la créole que sa fortune, disproportionnée à son humilité, mais dont elle était maîtresse quand même, pût être impuissante dans la cure qu’elle rêvait.

Parmi les hommes, une catégorie lui était devenue odieuse à jamais, semblait-il ; c’était la catégorie de ceux qui auraient pu l’épouser. Elle avait jeté sur le mariage un crêpe épais, qui ne lui permît plus de voir ni le sacrement, ni les épouseurs, mais ce n’était qu’avec plus de tendresse qu’elle se retournait alors vers l’enfance