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Page:Yves - La Pension du Sphinx.djvu/284

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Giuseppa, toujours aventureuse, sur la chaise où elle était grimpée tailladait les lilas à coups de sécateur ; ses sœurs et les Allemandes recevaient à pleins bras les rameaux tombés. Les misses Allen, dont le moindre labeur offensait la paresse, s’étaient contentées de recueillir des grappes de fleurs qu’elles respiraient en rêvant, et pendant que toutes ces robes fraîches, rouges, bleues ou roses, flambaient au soleil, la mince et longue robe noire d’Ogoth arpentait l’allée sablée un peu à l’écart. Elle tenait un livre à la main ; au coup de sonnette elle avait levé la tête et lancé vers le nouveau venu un regard de ses yeux illisibles, ses yeux gris comme les eaux froides du Nord. L’arc sombre de ses sourcils, la ligne pure de ses bandeaux noirs au-dessus de ces yeux de Scandinave dont nul regard de femme n’approche en Europe, et l’étrangeté de ce blanc et délicat visage impressionnèrent Mme de Bronchelles.

« Monsieur Nouvel ! monsieur Nouvel ! crièrent les Anglaises en bonnes camarades, venez voir le lilas !

— À quoi pensez-vous, miss Frida, en respirant tout ce parfum mauve ? Dieu me pardonne, vous avez des larmes aux yeux !