Page:Yves - La Pension du Sphinx.djvu/32

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marbre ; sur une commode, une frêle statue de la Vierge les bras tendus ; une plante verte haute et gracile sur un minime bureau. C’était un demi-luxe délicieux. Avec cela, de vagues parfums flottants, le silence, une attente de toutes ces choses : la chambre était prête, mais vide ; l’âme et la vie allaient bientôt lui venir…

Le soleil s’était couché. Les promeneuses étaient rentrées ; les trois Italiennes faisaient des gammes, simultanément, sur les trois pianos d’en bas qui, sous leurs sèches petites mains de fillettes, vibraient jusqu’au grenier. Ogoth Bjoertz travaillait déjà dans sa chambre ; les deux jeunes misses Allen, qui avaient reçu leurs revues d’Angleterre, les feuilletaient dans le corridor avant de s’être encore débarrassées de leurs fourrures, et Gertrude écrivait toujours aux petits frères d’interminables lettres en gros caractères, entre-mêlées de contes de fée, quand le bruit d’une voiture s’arrêtant devant la grille, et un coup de sonnette, éveillèrent tout à coup la maison. Frida et Nelly vinrent au perron. Les gammes cessèrent net, et Maria, Vittoria, Giuseppa, glissant sur le tapis, s’en furent se poster sournoisement derrière le rideau des fenêtres qui donnaient sur le jardin. Gertrude, dont la moindre émotion