Page:Yves - La Pension du Sphinx.djvu/61

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misérables aliments quatre, ou même cinq jours chaque semaine. Il passait ses nuits à gémir sur l’iniquité dont est remplie la terre, et souvent l’endroit où il avait prié était arrosé de ses larmes. Néanmoins sa solitude n’était pas si complète qu’elle le paraissait, car c’est une étrange erreur que de croire que les hommes et les femmes soient les seules créatures de Dieu capables d’adoucir pour l’homme l’exil de la terre ; c’est encore pour le solitaire une noble société que celle des bêtes, des plantes et de toutes choses de la nature, créées par Dieu mêmement que nous. Herménégilde le connut bientôt.

« Il conçut pour les arbrisseaux qu’il étayait et pour les troncs qu’il élaguait de ses mains un vif amour ; et s’il ne priait pas, c’était pour regarder s’ouvrir les fleurs de la forêt. Mais ce fut surtout pour les bêtes, êtres bien supérieurs aux inoffensifs végétaux, que s’accrut son attrait. Il y eut des merles et des rossignols qui vinrent siffler sur son épaule ; les brebis et les cerfs accoururent à lui, et les cruels sangliers s’adoucirent sous sa main ; et il n’en était pas de ce commerce comme de celui des hommes, dont l’unique livre qu’il eût emporté dans ce désert, l’Imitation, disait : « Ne vous mettez pas´en peine de la familiarité de beaucoup