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Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/élocution

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ÉLOCUTION s. f. (é-lo-ku-si-on — lat. elocutio ; de etoqui, parler, s’exprimer). Manière de s’exprimer, style : Elocution nette, facile, pure, simple, figurée, La facilité d’éLocution, chez beaucoup d’hommes et chez la plupart des femmes, est due à la rareté des idées et à la rareté des mots, (Swift.) Quand on ne songe pas, ou quand on songe peu à ce qu’on dit, l’élocution est coulante et n’a pas de forme. (J. Joubert.)

— Rhétor. Choix et arrangement de mots dans le discours : Les principales qualités de l’éLocution sont la clarté, la correction, l’orncment. (Chamfort.)

— Syn. Élocution, diction, style. V. diction.

— Eneycl. Selon Quintilien, le verbe eloqui signifie mettre au jour sa pensée, l’exprimer devant des auditeurs. L’élocution est donc la contexture même du discours, la suite des mots qui le composent, mots choisis et disposés de façon à rendre exactement les idées, & en montrer l’enchaînement, à faire ressortir l’importance plus ou moins grande qu’on veut leur donner, L’élocution est pour le discours parlé ce qu’est la diction pour l’œuvre écrite. V. diction.

Dans les traités de rhétorique, l’élocution vient en troisième ligne, précédée qu’elle est de l’invention et de la disposition. De même, dans les préoccupations de l’orateur, elle ne doit occuper que la troisième place. Il faut, en effet, que l’orateur, comme l’écrivain, commence par inventer, c’est-à-dire par trouver ses idées, ses preuves, ses moyens, puis qu’il les dispose et en ordonne la suite dans son esprit. Ces deux opérations terminées, il s’occupe de la forme et des expressions les plus propres à rendre pleinement sa pensée et à la faire passer chez l’auditeur. Il lui importe surtout que les mots se moulent le plus étroitement possible sur le fond des idées, et que des phrases vides ne viennent pas, sous prétexte d’ornement, embarrasser sa marche et distraire l’attention. De cet accord parfait entre le fond et la forme naîtra la clarté, à cette condition toutefois que l’orateur y joindra la correction du langage. Mais ce n’est point encore assez : celui qui parle ne doit pas oublier qu’il lui faut, pour convaincre, éviter la sécheresse, les chocs de mots qui nuisent à l’harmonie, rechercher l’èlégance sans tomber dans l’afféterie, et l’ornement des images, en se tenant éloigné d’une pompe étrangère au sujet. L’élocution a donc une grande importance ; elle est la clef des cœurs et des esprits. On ne saurait trop travailler à l’acquérir, avec toutes les qualités qui la caractérisent. Les orateurs célèbres y ont donné des soins constants. On le voit non-seulement dans l’élégance si admirable de Cicéron, mais dans les périodes plus mâles de Démosthène, dans les sermons fougueux de Bossuet comme dans les sermons si doux de Fénelon, dans les discours de Mirabeau comme dans ceux de Vergniaud, dans ceux de Berryer et de Jules Favre. Chez tous ces orateurs, l’élocution n’est point de même qualité, ni poussée au même degré ; mais, chez tous, elle concorde avec leur tempérament, leur tour d’esprit et le caractère de leur éloquence. Après s’être appliqués à l’acquérir dans les premières années d’un travail rude et patient, ils s’en sont fait une telle habitude, qu’elle se formule naturellement dans les répliques, les improvisations, et que, jaillissant à la même heure que l’invention et la disposition, le discours sort tout armé de leur bouche.

Il ne faut pas confondre l’élocution ni la diction avec le style.


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