L’ESCLAVE
Tel, nu, sordide, affreux, nourri des plus vils mets,
Esclave — vois, mon corps en a gardé les signes —
Je suis né libre au fond du golfe aux belles lignes
Où l’Hybla plein de miel mire ses bleus sommets.
J’ai quitté l’île heureuse, hélas !… Ah ! si jamais
Vers Syracuse et les abeilles et les vignes
Tu retournes, suivant le vol vernal des cygnes,
Cher hôte, informe-toi de celle que j’aimais.
Reverrai-je ses yeux de sombre violette,
Si purs, sourire au ciel natal qui s’y reflète
Sous l’arc victorieux que tend un sourcil noir ?
Sois pitoyable ! Pars, va, cherche Cléariste
Et dis-lui que je vis encor pour la revoir.
Tu la reconnaîtras, car elle est toujours triste.