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Code de commerce 1807/Livre II, Titre IX

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France
Livre II, Titre IX : Des Contrats à la grosse.
(p. 58-62).

TITRE IX.
Des Contrats à la grosse.


Art. 311. Le contrat à la grosse est fait devant notaire, ou sous signature privée.

Il énonce

Le capital prêté et la somme convenue pour le profit maritime,

Les objets sur lesquels le prêt est affecté,

Les noms du navire et du capitaine,

Ceux du prêteur et de l’emprunteur;

Si le prêt a lieu pour un voyage,

Pour quel voyage, et pour quel temps;

L’époque du remboursement.

312. Tout prêteur à la grosse, en France, est tenu de faire enregistrer son contrat au greffe du tribunal de commerce, dans les dix jours de la date, à peine de perdre son privilége;

Et si le contrat est fait à l’étranger, il est soumis aux formalités prescrites à l’article 234.

313. Tout acte de prêt à la grosse peut être négocié par la voie de l’endossement, s’il est à ordre.

En ce cas, la négociation de cet acte a les mêmes effets et produit les mêmes actions en garantie que celle des autres effets de commerce.

314. La garantie de paiement ne s’étend pas au profit maritime, à moins que le contraire n’ait été expressément stipulé.

315. Les emprunts à la grosse peuvent être affectés,

Sur le corps et quille du navire,

Sur les agrès et apparaux,

Sur l’armement et les victuailles,

Sur le chargement,

Sur la totalité de ces objets conjointement, ou sur une partie déterminée de chacun d’eux.

316. Tout emprunt à la grosse, fait pour une somme excédant la valeur des objets sur lesquels il est affecté, peut être déclaré nul, à la demande du prêteur, s’il est prouvé qu’il y a fraude de la part de l’emprunteur.

317. S’il n’y a fraude, le contrat est valable jusqu’à la concurrence de la valeur des effets affectés à l’emprunt, d’après l’estimation qui en est faite ou convenue;

Le surplus de la somme empruntée est remboursé avec intérêt au cours de la place.

318. Tous emprunts sur le fret à faire du navire et sur le profit espéré des marchandisesm sont prohibés.

Le prêteur, dans ce cas, n’a droit qu’au remboursement du capital, sans aucun intérêt.

319. Nul prêt à la grosse ne peut être fait aux matelots ou gens de mer sur leurs loyers ou voyages.

320. Le navire, les agrès et les apparaux, l’armement et les victuailles, même le fret acquis, sont affectés par privilège au capital et intérêts de l’argent donné à la grosse sur le corps et quille du vaisseau.

Le chargement est également affecté au capital et intérêts de l’argent donné à la grosse sur le chargement.

Si l’emprunt a été fait sur un objet particulier du navire ou du chargement, le privilége n’a lieu que sur l’objet, et dans la proportion de la quotité affectée à l’emprunt.

321. Un emprunt à la grosse fait par le capitaine dans le lieu de la demeure des propriétaires du navire, sans leur autorisation authentique ou leur intervention dans l’acte, ne donne action et privilége que sur la portion que le capitaine peut avoir au navire et au fret.

322. Sont affectées aux sommes empruntées, même dans le lieu de la demeure des intéressés, pour radoub et victuailles, les parts et portions des propriétaires qui n’auraient pas fourni leur contingent pour mettre le bâtiment en état, dans les vingt-quatre heures de la sommation qui leur en sera faite.

323. Les emprunts faits pour le dernier voyage du navire sont remboursés par préférence aux sommes prêtées pour un précédent voyage, quand même il serait déclaré qu’elles sont laissées par continuation ou renouvellement.

Les sommes empruntées pendant le voyage sont préférées à celles qui auraient été empruntées avant le départ du navire; et s’il y a plusieurs emprunts faits pendant le même voyage, le dernier emprunt sera toujours préféré à celui qui l’aura précédé.

324. Le prêteur à la grosse sur marchandises chargées dans un navire désigné au contrat, ne supporte pas la perte des marchandises, même par fortune de mer, si elles ont été chargées sur un autre navire, à moins qu’il ne soit légalement constaté que ce chargement a eu lieu par force majeure.

325. Si les effets sur lesquels le prêt à la grosse a eu lieu, sont entièrement perdus, et que la perte soit arrivée par cas fortuit, dans le temps et dans le lieu des risques, la somme prêtée ne peut être réclamée.

326. Les déchets, diminutions et pertes qui arrivent par le vice propre de la chose, et les dommages causés par le fait de l’emprunteur, ne sont point à la charge du prêteur.

327. En cas de naufrage, le paiement des sommes empruntées à la grosse est réduit à la valeur des effets sauvés et affectés au contrat, déduction faite des frais de sauvetage.

328. Si le temps des risques n’est point déterminé par le contrat, il court, à l’égard du navire, des agrès, apparaux, armement et victuailles, du jour que le navire a fait voile, jusqu’au jour où il est ancré ou amarré au port ou lieu de sa destination.

A l’égard des marchandises, le temps des risques court du jour qu’elles ont été chargées dans le navire, ou dans les gabares pour les y porter, jusqu’au jour où elles sont délivrées à terre.

329. Celui qui emprunte à la grosse sur des marchandises, n’est point libéré par la perte du navire et du chargement, s’il ne justifie qu’il y avait, pour son compte, des effets jusqu'à la concurrence de la somme empruntée.

330. Les prêteurs à la grosse contribuent, à la décharge des emprunteurs, aux avaries communes.

Les avaries simples sont aussi à la charge des prêteurs, s’il n’y a convention contraire.

331. S’il y a contrat à la grosse et assurance sur le même navire ou sur le même chargement, le produit des effets sauvés du naufrage est partagé entre le prêteur à la grosse, pour son capital seulement, et l’assureur pour les sommes assurées, au marc le franc de leur intérêt respectif, sans préjudice des priviléges établis à l’article 191.