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Correspondance de Voltaire/1762/Lettre 4987

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Correspondance : année 1762GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 42 (p. 191-192).

4987. — À M. DEBRUS OU À M. CATHALA[1].
31 juillet.

Ayant lu la lettre du 26 juillet de Mme Calas, les lettres de M. Lavaysse des 14 et 15 juillet, je suis toujours d’avis que l’on consulte M. Héron, premier commis du conseil.

Je ne crois pas que monsieur le chancelier puisse trouver mauvais qu’on présente une requête au roi en son conseil, puisque c’est à monsieur le chancelier même qu’on donne cette requête. Je pense qu’il faut en ce cas donner copie de cette requête à chaque membre du conseil des dépêches.

C’est probablement dans ce conseil des dépêches que l’on décidera à quel tribunal on renverra l’affaire. Il se pourra très-bien faire que le conseil des dépêches la jugera lui-même. Il ne faut pas croire que ce conseil ignore les affaires, puisque monsieur le chancelier, monsieur le garde des sceaux, M. le comte de Saint-Florentin, monsieur le contrôleur général, etc., sont de ce conseil. J’ajoute même qu’ils sont très-bien disposés en faveur des plaignants.

Si le roi renvoie l’affaire à un autre tribunal, je souhaite qu’elle soit portée au grand conseil, parce que mon neveu, qui est membre de ce tribunal, agira avec autant de zèle que moi-même.

Voilà tout ce que je peux dire de si loin.

À l’égard des sieurs Lavaysse père et fils, si j’étais à leur place, j’élèverais ma voix toute ma vie contre le parlement de Toulouse. Je vendrais tout ce que je pourrais vendre de mon bien, je mettrais à l’abri tout ce que je pourrais, et je quitterais une ville superstitieuse où des bateleurs blancs, bleus, gris et noirs, avec un masque sur le visage, percé de deux trous, font mettre aux fers et sur la roue l’innocence la plus avérée. Je ne doute pas qu’on ne puisse faire en Angleterre, en Hollande, et dans quelques pays de l’Allemagne, une souscription qui vaudrait à MM. Lavaysse et Calas beaucoup plus qu’ils n’auront perdu à Toulouse.

Si on veut prendre ce parti, il n’y a rien que je ne tente pour le faire réussir,

  1. Éditeur, A. Coquerel.