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Histoire d’une grande dame au XVIIIe siècle, La princesse Hélène de Ligne/11

La bibliothèque libre.
Calmann Lévy (1p. 212-229).

III


La maison de Ligne. — Le prince Charles. — La guerre de Bavière. — Le combat de Pôsig. — Lettre du prince de Ligne à son fils — La paix de Teschen.



La maison de Ligne était une des plus illustres des Pays-Bas. Son chef, Charles-Joseph, prince de Ligne et du Saint-Empire, souverain de Fagnolles, seigneur de Beaudour, Bel-Œil, Valincourt et autres terres, marquis de Roubaix et de Wershin, chevalier de la Toison d’or, grand d’Espagne de première classe, premier ber de Flandre, pair, sénéchal et maréchal du Hainaut, était général de l’armée autrichienne, capitaine des trabans, colonel propriétaire d’un régiment d’infanterie wallone et chambellan de Leurs Majestés Impériales[1].

Il y avait là de quoi satisfaire les plus hautes ambitions ; mais ce n’était pas tout, il fallait ajouter à tous ces titres la situation qu’occupait le prince de Ligne à Versailles, à Vienne et à Bruxelles, situation conquise par ses brillantes qualités personnelles. Beau, brave, généreux, chevaleresque, doué d’une imagination brillante, d’un esprit vif et prompt, et d’un naturel plein d’imprévu, aucun de ces avantages n’avait pu lui donner la moindre prétention. Tous les mémoires contemporains parlent de lui, les esprits les plus divers ; mesdames de Staël, de Genlis, le comte de Ségur, l’aventurier Casanova, l’empereur Joseph, Voltaire, l’impératrice Catherine, et bien d’autres encore, s’unissent dans un concert de louanges, où pas un mot de critique ne vient détonner. Madame de Staël termine son portrait en disant comme Eschine : « Si vous êtes étonné de ce que je vous raconte de lui, que serait-ce si vous l’aviez entendu ! » Tel était le futur beau-père d’Hélène.

Le prince Charles-Joseph avait été élevé par son père avec une extrême sévérité : « Mon père ne m’aimait pas, dit-il ; je ne sais pourquoi, car nous ne nous connaissions point. Il ne me parlait jamais, ce n’était pas à la mode alors d’être bon père ni bon mari. Ma mère avait grand’peur de lui. Elle accoucha de moi en grand vertugadin et elle mourut de même, quelques semaines après, tant il aimait les cérémonies et l’air de dignité. » Sa carrière militaire fut brillante et son avancement rapide. À vingt ans, il fut nommé colonel du régiment des dragons de son père. Il lui écrivit aussitôt pour lui en faire part, et voici la réponse qu’il reçut :

« Il était déjà assez malheureux pour moi, Monsieur, de vous avoir pour fils, sans avoir encore le malheur de vous avoir pour mon colonel. »

Son fils lui répondit : « Monseigneur, l’un et l’autre ne sont pas ma faute, et c’est à l’empereur que Votre Altesse doit s’en prendre pour le second malheur. »

Le prince épousa, en 1755, la princesse de Lichtenstein[2], et, en septembre 1759, pendant qu’il était occupé à battre les Prussiens devant Meissen, il apprit la nouvelle de la naissance d’un fils.

« J’ai un fils, écrit-il tout joyeux. Ah ! comme je vais l’aimer, je voudrais déjà le lui écrire… Si je reviens de cette guerre, je lui dirai : « Soyez le bienvenu, je parie que je vais vous aimer de tout de mon cœur. »

En effet le prince avait trop souffert des rigueurs de son père pour les imiter ; tous ses enfants furent élevés avec une grande tendresse, mais il ne put jamais se défendre d’une prédilection marquée en faveur de l’aîné, le prince Charles, prétendant de notre jeune princesse. Il lui apprit lui-même ce qu’il savait le mieux, « se battre en gentilhomme ». Le petit prince, encore enfant, fut conduit au feu par son père. « Je fis, dit-il, engager un petit combat d’avant poste avec les Prussiens, et m’élançant à cheval avec lui, je pris sa petite main dans la mienne tout en galopant, et, au premier coup de fusil que je fis tirer : « Il serait joli, mon Charles », lui dis-je, « que nous eussions ensemble une petite blessure ». Et il riait, jurait, s’animait et jugeait ! » Après avoir suivi l’école de Strasbourg[3] pendant quatre ans, le prince Charles entra à seize ans au service d’Autriche, comme second lieutenant du génie. Il eût préféré l’artillerie, et ne choisit le génie que pour complaire à son père.

Au moment où les négociations pour le mariage d’Hélène commencèrent, la guerre entre l’Autriche et la Prusse venait d’éclater à l’occasion de la succession de Bavière, et les deux princes de Ligne étaient à l’armée autrichienne.

Maximilien-Joseph, électeur de Bavière, était mort le 30 décembre 1777, sans postérité masculine. Malgré les droits incontestables de l’Électeur palatin, d’autres princes élevèrent des prétentions à cette succession. Le plus redoutable était l’empereur Joseph II. L’Électeur avait à peine fermé les yeux, que les troupes autrichiennes marchaient vers les frontières de ses États.

Cela inquiéta la Prusse, et le jeune duc des Deux-Ponts, pressé et appuyé par le grand Frédéric, protesta devant la Diète germanique contre les projets de l’Autriche. L’électeur de Saxe suivit cet exemple, et, durant la discussion de cette grave affaire, Joseph et Frédéric allèrent l’un en Silésie, et l’autre en Bohème prendre le commandement des armées considérables qu’ils avaient mises sur pied. Ils restèrent ainsi en présence pendant plusieurs mois. Marie-Thérèse, qui redoutait la guerre, négociait sous main pour l’empêcher. Joseph, au contraire, brûlant de se mesurer avec le grand Frédéric, y poussait de toutes ses forces[4].

L’armée autrichienne était séparée en deux corps, l’un commandé officiellement par l’empereur, mais en réalité par le maréchal de Lascy ; l’autre, par le maréchal Laudon, comprenait les Lycaniens ou Croates et les régiments de grenadiers d’élite qui avaient le prince de Ligne pour chef. Son quartier général était à Bezesnow, en Bohème. Son fils servait dans le corps du maréchal de Lascy, qui occupait une position formidable derrière les rives escarpées de l’Elbe ; de triples redoutes défendaient le passage de ce fleuve. C’est précisément à leur construction que travaillait le prince Charles auquel son père écrivait souvent Ses lettres vont nous donner la mesure des affectueuses relations qui existaient entre eux. Il paraît que le prince Charles était mécontent de la façon dont on voulait diriger les travaux de fortifications.


« De mon quartier général de Bezcsnow, ce 26 juin 1778.


» Eh bien, mon génie, tu te fortifies donc toujours, et tu ne te fortifies pas dans ta considération pour le génie de notre génie ? J’ai beaucoup de peine, moi, à me fortifier contre l’ennui.

» L’empereur est venu ici faire ce qu’on peut bien appeler ses embarras. Il dit qu’il souhaite la guerre, mais qu’il n’y croit pas : Qui veut parier ? nous a-t-il dit l’autre jour. — Tout le monde, a répliqué le maréchal Laudon, toujours de mauvaise humeur, — Ce n’est rien dire, tout le monde. — Mais moi, par exemple, a dit le maréchal Lasey. — Combien ? a dit l’empereur, qui s’attendait à une proposition d’une vingtaine de ducats. — Deux cent mille florins, a dit le maréchal. L’empereur a fait une mine diabolique et a senti que c’était une leçon publique,

» Il aété très aimable pour moi. Il craint toujours qu’on ne fasse le docteur avec lui. Il a été content de mes troupes, et m’a dit beaucoup de bien de vous, mon cher Charles, qu’il a vu travailler comme une merveille. Le voilà parti, je le vois encore depuis ma fenêtre.

» Je ris de moi et des autres, quand je pense que, point apprécié, je trouve que je vaux mieux qu’on ne croit. J’exerce ici chaque peloton moi-même. Je m’égosille à commander six bataillons à la fois.

» Il n’y a pas, ce qu’on appelle, en Bohême, un kaloup, la plus mauvaise baraque, où il y ait seulement quatre soldats, que je n’aille visiter, pour goûter leur soupe, leur pain, peser leur viande, pour voir si on ne les trompe pas. Il n’y en a pas un à qui je ne parle, à qui je ne fasse avoir des légumes, à qui je ne donne quelque chose ; pas un officier à qui je ne donne à manger, et que je ne tâche d’électriser pour cette guerre-ci. Mes camarades ne font rien de tout cela, et c’est très sage à eux, car on ne leur en sait pas mauvais gré. Pas un ne se soucie de la guerre, ils tiennent les propos les plus pacifiques vis-à-vis des jeunes gens qu’ils veulent rendre avec le temps aussi zélés et bons généraux. C’est encore très bien. Ils seront généraux plus tôt que moi, et ce sera aussi très bien.

» Il y a six semaines que je n’ai parlé français ; mais, en revanche, pour me payer d’un ennuyeux diner, en sortant de table, on tire une trentaine de pieds à la fois pour me faire la révérence.

» Si un officier d’infanterie peut saluer un officier du génie, et du génie en travail, je t’embrasse, mon garçon. Je suis charmé que tu te fasses du mérite à faire de mauvais ouvrages. Adieu, mon excellent ouvrage ; adieu chef-d’œuvre, presque comme Christine[5]. »

En attendant, l’empereur et le roi de Prusse, toujours dans l’inaction, échangeaient force courriers. Le prince de Ligne, bien informé, tenait son fils au courant de ce qui se passait.


« Bezesnow, ce 5 juillet.


» J’apprends dans ce moment que le maréchal a demandé, le jour de la Saint-Jean, à l’empereur, ce qu’il venait de répondre à la lettre du roi de Prusse, qu’il a reçue ce jour-là. « Je l’ai mis au pied du mur, » a-t-il répondu, « je lui ai représenté que la saison s’avançait, que je voulais avoir des leçons d’un si grand maître. Quand croyez-vous, mon cher maréchal, que j’aurai sa réponse ? » Celui-ci a compté sur ses doigts et a dit : « Dans huit jours Votre Majesté l’aura ; mais c’est lui qui vous l’apportera lui-même. »

» J’apprends à l’instant qu’il entre en Bohême ; c’est le 5 juillet, le compte est juste, tant mieux, je reçois l’ordre de marcher avee tout mon corps. »

En effet, le roi de Prusse venait de paraître inopinément à Nachod, à la tête de son avant-garde. « On l’en pressait, dit le prince de Ligne, mais on ne s’en doutait pas. » Il écrit à son fils.


« Juillet.


» Comme je ne vous crois pas encore revenu de Pardulitz à votre armée, il faut que je vous en donne des nouvelles. On est venu faire des rapports à l’empereur, que le roi débouchait sur je ne sais combien de colonnes. Il a été au grand galop à la redoute numéro 7 et a demandé vingt fois : « Où est le maréchal ? » Celui-ci est arrivé au pas pour la première fois de sa vie : « Eh bien, feld-maréchal, je vous ai fait chercher partout. — Eh bien, sire, voilà le roi. — Votre grande lunette… Ah ! le voilà lui-même, je parie ! un grand cheval anglais… peut-être son Anhalt, voyez. — Cela se peut ; mais ils ne nous battront pas tout seuls, voyons plutôt la force des colonnes, oh ! en voilà une sûrement de dix mille hommes, entre autres. — Ils viennent donc nous attaquer ? — Peut-être, quelle heure est-il ? — Onze heures. — Ils ne seront formés que dans deux heures, ils feront la cuisine, nous aussi ; ils n’attaqueront pas Votre Majesté aujourd’hui. — Non, mais demain ? — Dermain ! je ne le crois pas, après demain non plus, ni de toute la campagne. »

» Vous reconnaissez bien là le genre froid et un peu amer de notre bon maréchal, ennuyé de ce qu’on veut se mêler à tous moments de ses affaires, et l’inquiétude de l’empereur, qui, dans ces occasions-là, sent que tout cela est trop fort pour lui. »

Enfin la guerre était engagée, mais on se contentait de s’observer des deux côtés. Le prince Charles rejoignit son père à Mickenhau le 30 juillet ; celui-ci le prit au nombre de ses aides de camp, on le voyait toujours à l’avant-garde, plein de sang-froid et de valeur, au milieu du danger. Son pére en parle sans cesse avec une fierté qu’il ne peut cacher : « Charles va au feu à merveille, je ne puis retenir son ardeur, il a une présence d’esprit, un entrain et une gaieté qui encouragent tout le monde, je dois dire en passant que l’empereur est fort content de lui. » C’est ainsi que s’exprime le prince dans le récit, pittoresque et charmant, qu’il nous a laissé de cette guerre de Bavière, qui eut pour trait particulier que pas un coup de fusil ne fut tiré en Bavière et que deux armées de plus de cent mille hommes, commandées l’une par le roi de Prusse et l’autre par l’empereur d’Autriche, demeurèrent en présence pendant neuf mois sans se livrer bataille, se bornant à quelques escarmouches, ou combats d’avant-poste.

Le prince, désespéré de cette inaction[6], ne négligeait pas une occasion d’engager une affaire. Laissons-lui raconter celle de Pösig, qui fut la première à laquelle assista le prince Charles, et qui eut une grande influence sur sa carrière militaire.

« Des hussards du prince Henri[7] occupaient sur les hauteurs de Hühnerwasser d’assez fortes positions. IL fallait, pour les déloger, s’emparer d’abord du couvent de Pösig, où était une petite garnison de quarante hommes, qui ne prenaient garde qu’à examiner tout le jour tout ce qui se passait dans nos camps. Cette lorgnerie perpétuelle impatientait souvent M. de Laudon ; je lui dis que le colonel d’Aspremont m’avait déjà proposé de l’attaquer, mais que, même cette montagne prise, elle serait difficile à garder, étant plus près du prince Henri que de nous. Il me dit d’essayer si je pouvais… » « … Mais la garnison était sur ses gardes, on avait mis une sentinelle à la porte du moine qui me donnait des nouvelles, on avait barricadé la porte d’entrée et élevé des tréteaux. Les braves Lycaniens l’attaquèrent, une heure avant le jour. Au moment où je me formais sur ma petite plaine. Cinquante étaient nommés à l’escalade. Tous voulaient en être, mais il n’y avait que cinq échelles, si j’en avais fait chercher davantage, cela se serait ébruité dans le pays. Quoiqu’elles fussent un peu courtes, un de ces braves Croates fut tué sur le mur. Tous avaient été accablés d’une grêle de pierres en arrivant, le colonel d’Aspremont ne put plus les retenir. Le digne et respectable Wolf, premier lieutenant, monta le premier ; il reçut un coup de fusil au travers du bras. Tout d’un coup, on se dit, sans savoir d’où venait la nouvelle, que la porte venait d’être enfoncée : tous y coururent. Wolf reçut un coup de fusil au travers du corps, dont il mourut deux jours après, en me disant qu’il me sacrifierait encore mille vies s’il les avait. Un sergent et cinq charpentiers qui hachaient la porte furent tués sur place, et vingt-cinq hommes furent blessés.

» Jamais rien ne m’a fait autant de peine dans le monde, que de voir ces beaux et excellents Lycaniens étendus les uns à côté des autres, et me disant, ainsi que leur lieutenant, des choses si touchantes. Autrefois, quand je faisais tuer du monde, ce dont j’aurais pu quelquefois me dispenser, je partageais le danger, et cela ne me faisait pas le même effet. Mais j’avais envoyé ces pauvres malheureux, et, ne pouvant pas être partout, croyant d’ailleurs avoir plus à faire où j’étais, je m’aperçus qu’il était souvent dur d’être officier général, parce qu’on était exposé à faire tuer les autres, sans y être. »

Le prince Charles reçut une impression si vive de la confiance et du dévouement que son père savait inspirer à ses soldats, et des éloges qu’il lui entendit donner par le lieutenant Wolf, à son lit de mort, qu’il la conserva toute sa vie comme nous le verrons plus tard. Quelques jours après, la maréchal Laudon[8] vint chez le prince et lui ordonna de mettre tout son corps en marche, pour déloger les hussards d’Hühnerwasser :

« À peine étions-nous à Jezoway que la tiraillerie des carabines commença, et que par conséquent le maréchal s’anima, et me fit voir en abrégé le vainqueur de Francfort et de Landshut, c’est la première et la dernière fois qu’il a souri de toute la campagne.

» Charles qui est brave, que c’est un plaisir, et que je tenais par la main en galopant, et à qui je disais (comme autrefois) : « Il serait plaisant d’être blessé de la même balle ! » porta après cela l’ordre de se retirer à un officier qui fut blessé en le recevant. Charles était dans l’enchantement de tirer son coup de pistolet et d’en recevoir. M. de Laudon et moi, nous en essuyâmes bien aussi, parce que s’emportant comme s’il était encore lieutenant des Lycaniens, surtout la première fois qu’il voit l’ennemi après une longue paix, il alla lui-même faire retirer Klégawiez et Pallackzi, qu’il trouvait tournés.

» Je lui dis : « Monsieur le maréchal, envoyez-y plutôt nos officiers d’ordonnance et nos aides de camp. » Je me retournai, il n’yen avait plus, ils étaient allés comme des étourdis avec Charles Pösig fut pris vers midi.

» Ainsi se passa une très jolie petite et amusante affaire, pareille à celles que messieurs les adjudants des généraux font mousser dans des relations et que les gazetiers correspondants transmettent, comme de grands faits d’armes, aux cafés et aux sociétés des capitales. »

Pendant ce temps, Marie-Thérèse, ennemie de cette guerre, négociait sans relâche pour amener une conciliation, et, gagnant la czarine Catherine à sa cause, elle y réussit enfin malgré l’empereur Joseph, qui connut trop tard les négociations secrètes de sa mère.

Un congrès s’ouvrit le 10 avril 1779, à Teschen, pour négocier la paix ; tout étant presque réglé d’avance, on semblait devoir être bientôt d’accord ; néanmoins, plus d’une difficulté surgit à l’improviste, et la paix ne fut signée que le 13 mai 1779. Tout fut bizarre dans cette guerre : la maison palatine, pour l’intérêt de laquelle cette guerre avait été entreprise, n’y prit aucune part ; la Bavière, objet du litige, ne fut point enveloppée dans les hostilités, et l’Électeur palatin, qui avait refusé l’assistance du roi de Prusse, dut à sa protection le principal avantage de la paix. La fin de cette guerre sans bataille fut de donner beaucoup d’humeur à tout le monde, à commencer par le prince de Ligne. « Je n’étais pas le seul qui en eût, dit-il ; l’impératrice parce qu’on n’avait pas fait la paix assez tôt, l’empereur parce qu’on la faisait à son insu ; le maréchal Lascy parce qu’on avait dérangé son plan, qui, s’il avait été suivi, aurait eu bientôt plus d’avantages ; le maréchal Laudon de n’avoir été qu’observateur et observé ; le roi de Prusse d’avoir dépensé vingt-cinq millions d’écus et vingt-cinq mille hommes pour n’avoir jamais fait ce qu’il voulait ; le prince Henri pour avoir été contrarié par lui. »

  1. Il fut plus tard créé feld-maréchal comme son père et son grand-père.
  2. Françoise-Marie-Xavière de Lichtenstein, née le 25 novembre 1740, fille d’Emmanuel, prince de Lichtenstein, et de Marie-Antoine de Dietrichstein Waichseltadt.
  3. Il y avait alors, à Strasbourg une école d’artillerie très renommée, elle était commandée par de Marzy. L’Alsace appartenait alors à la France, par le traité de Ryswick, signé en 1697. Strasbourg avait capitulé dès le 30 septembre 1681 et s’était soumise à Louis XIV ; fortifiée par Vauban, elle était devenue une redoutable forteresse. Son arsenal contenait neuf cents pièces de canon.
  4. Bulhière, esprit passionné, mais fin observateur, disait de l’empereur Joseph : « La paix était un tourment pour lui, envahissement et conquête étaient le résultat de toutes ses méditations. Ces deux mots avaient fait la célébrité de Frédéric et c’était avec eux que Joseph voulait atteindre et même surpasser son rival. Cet homme fier éprouvait partout le supplice d’une inquiétude nerveuse et jalouse. »
  5. La princesse Christine était la fille aînée du prince de Ligne, elle avait épousé en 1775 le comte Clary, fils aîné du prince de ce nom ; elle était adorée de tous ceux qui la connaissaient,
  6. La guerre était une fête pour le prince de Ligne ; dès son enfance, il l’adorait. Il faut l’entendre parler d’une bataille : « Une bataille, dit-il, est comme une ode de Pindare : il faut y apporter un enthousiasme qui tient du délire ! Pour en bien parler, il faudrait, je crois, un moment d’ivresse comme lorsqu’on en gagne. »
  7. Le prince Henri de Prusse, frère du roi, né le 18 janvier 1726, mort le 3 avril 1802. Il avait, dit-on de grands talents militaires, mais son frère cn était jaloux et ne l’aimait point,
  8. Laudon (Gédéon-Ernest, baron de), feld-maréchal autrichien, né le 16 octobre 1710 à Trolsen en Livonie. Il servit d’abord la Russie de 1733 à 1739, et, ne trouvant pas son avancement assez rapide, il entra au service de l’Autriche. En récompense de ses importants services, l’empereur Joseph le nomma en 1769, commandant général de la Moravie et feld-maréchal en 1778. L’impératrice Catherine disait : « Je ne peux voir l’amiral Tchichtakoff sans me souverir du mot du prince de Ligne sur le maréchal Laudon. Quelqu’un lui demandait comment il le reconnaîtrait : « Allez, »« dit-il, « vous le trouverez derrière la porte, tout honteux de son mérite et de sa supériorité. » Voilà. mon amuiral tout décrit. »