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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 9, 1838.djvu/319

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— Non, non, il n’est pas un de leurs grands chefs, comme ils les appellent. Cependant il est du meilleur sang montagnard, et descend en droite ligne du vieux Glenstrae. Je connais bien sa famille, car nous sommes proches parents. Ne croyez pas cependant que j’y attache une grande importance : c’est l’image de la lune dans un seau d’eau ; c’est de la crème fouettée, comme on dit ; mais je pourrais vous montrer des lettres de son père, qui était le troisième descendant de Glenstrae, et qu’il adressait au mien, le diacre Jarvie (paix soit à sa mémoire !) qui commencent par : Mon cher diacre, et finissent par : Votre affectionné cousin, prêt à vous servir. Elles ont presque toutes rapport à de l’argent prêté, et le digne diacre les conservait comme des documents qui pouvaient être utiles un jour ; c’était un homme soigneux !

— Mais s’il n’est pas un de ces lairds ou chefs de clan dont vous parliez tout-à-l’heure, votre parent du moins, à ce que je présume, jouit d’une grande influence dans les hautes terres ?

— Ah ! vous pouvez le dire sans vous tromper : il n’y a pas de nom mieux connu entre Lennox et Breadalbane. Robin était autrefois un marchand de bestiaux, le plus honnête et le plus laborieux que vous eussiez rencontré entre dix mille. C’était un plaisir de le voir dans son costume montagnard, avec son plaid écossais, son bouclier sur l’épaule, son sabre et son poignard à la ceinture, conduisant une centaine de bœufs et suivi d’une douzaine de gillies[1] aussi sauvages que ces animaux eux-mêmes. C’était un homme qui mettait de l’honnêteté et de la justice dans toutes les affaires qu’il faisait, et s’il pensait que son acheteur eût fait un mauvais marché, il lui donnait un dédommagement. Je l’ai vu faire une remise de cinq schellings par livre sterling.

— Vingt-cinq pour cent ! dit Owen : l’escompte était considérable.

— Oui, monsieur, il le faisait comme je vous le dis, surtout s’il croyait que l’acheteur fût pauvre et peu en état de supporter une perte ; mais les temps devinrent difficiles, et Rob se hasarda trop. Ce ne fut pas ma faute, ce ne fut pas ma faute ! il peut le dire, je l’en avais averti. Alors ses créanciers, et particulièrement quelques uns de ses riches voisins, s’emparèrent de ses terres et de tout ce qu’il possédait : on dit même qu’ils en chassèrent sa femme après l’avoir bien maltraitée, qui pis est. C’est honteux,

  1. Suivants, affidés. a. m.