Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 9, 1838.djvu/373

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— En avant, marche ! répéta le sous-officier. Houzza ! mes enfants ! pour la tête de Rob-Roy une bourse pleine d’or. »

Il s’avança au pas de charge suivi de six soldats, mais au moment où ils atteignaient le premier tournant du défilé, une douzaine d’armes à feu partirent de différents côtés. Le sergent frappé d’une balle au milieu du corps, fit encore un effort pour continuer de monter, s’appuyant sur ses mains pour gravir la surface du roc ; mais ses forces l’abandonnèrent, et après ce dernier effort il tomba, et roula le long du rocher jusqu’au fond du lac, où il disparut. Trois soldats tombèrent tués où blessés ; les trois autres atteints, plus ou moins dangereusement, se replièrent sur le corps principal.

« Grenadiers, en avant ! » cria le capitaine. Je dois vous rappeler qu’à cette époque les grenadiers portaient en effet cette arme destructive d’où ils ont tiré leur nom. Quatre grenadiers marchèrent donc en tête de la troupe, et Thornton se disposa à les soutenir. « Messieurs, nous dit-il alors, mettez-vous à l’abri du danger ; retirez-vous… Grenadiers, ouvrez vos gibernes ; grenades en main ; allumez la mèche ; en avant ! »

La troupe s’avança en poussant des cris, le capitaine en tête ; les grenadiers jetaient leurs grenades dans les buissons où se cachait l’ennemi, et les fusiliers gravissaient bravement le rocher. Dougal, oublié dans ce tumulte, se glissa prudemment dans les broussailles qui couvraient le roc, et qui dominaient cette partie de la route où nous nous étions arrêtés d’abord ; il y grimpa avec l’agilité d’un chat sauvage. Je suivis son exemple avec une espèce d’instinct qui me fit penser que le feu des montagnards balaierait tout ce qui se trouverait dans le sentier battu. J’étais hors d’haleine ; car un feu roulant dont chaque coup était répété par mille échos, le sifflement des fusées des grenades et leur explosion, les cris des soldats, les hurlements des montagnards, formaient un fracas qui, je ne crains pas de l’avouer, semblait me donner des ailes pour arriver à un lieu de sûreté. Les difficultés augmentèrent bientôt tellement, que je désespérai de rejoindre Dougal qui s’élançait de roc en roc et sautait de tronc d’arbre en tronc d’arbre avec la légèreté d’un écureuil. Enfin je m’arrêtai, afin de jeter un regard derrière moi et de découvrir ce qu’étaient devenus mes compagnons ; je les vis tous deux dans une position très critique.

Le bailli, à qui la peur avait probablement donné un degré d’agilité extraordinaire, était parvenu à gravir à la hauteur de vingt