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Page:Œuvres mêlées 1865 III.djvu/204

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pour verser des larmes. Les nuits suivantes, je dormis quelques heures d’un sommeil inquiet, par un sentiment secret de mes douleurs ; et je ne m’éveillai pas sitôt que je retrouvai mes soupirs, mes pleurs et tous les tristes effets de mon tourment. Je les cache le jour, autant que je puis ; mais il n’y a point d’heures qui n’échappent à la contrainte que je leur donne ; et voilà, Madame, cet homme si peu animé, ce grand partisan des amitiés commodes et aisées.

Comment est-il possible que vous quittiez des gens que vous charmez et qui vous adorent, des amis qui vous aiment mieux qu’ils ne s’aiment eux-mêmes, pour aller chercher des inconnus qui vous déplairont et dont vous serez peut-être outragée ? Songez-vous, Madame, que vous vous jetez dans un couvent, que Madame la Connétable2 avoit en horreur. Si elle y rentre, c’est qu’il y faut rentrer ou mourir ; sa captivité présente, toute affreuse qu’elle est, lui semble moins dure que cet infortuné séjour ; et pour y aller, Madame, vous voulez quitter une cour où vous êtes estimée, où l’affection d’un roi doux et honnête vous traite si bien, où toutes les personnes raisonnables ont du respect et de l’amitié pour vous. Le


2. Marie Mancini, sœur de Mme Mazarin, qui avoit épousé le prince Colonne, connétable du royaume de Naples.