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Page:Abadie - Paroisse Saint-Michel de Bordeaux. Restauration de la tour isolée, 1857.djvu/8

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Examinons maintenant si la tour de Saint-Michel, parce qu’elle est d’un style généralement peu goûté par les archéologues puristes, ne doit pas exciter la sollicitude des amis des arts, du Gouvernement et de la ville de Bordeaux.

La Guyenne ne possède aucun édifice important du XIIIe siècle ; on n’y rencontre ce style que par fragments ; encore n’y est-il le plus souvent que du Roman élancé, avec une certaine modification dans le galbe de ses chapiteaux, quelquefois aussi dans l’esprit de son ornementation ; mais la transformation n’a jamais été complète. Le XIVe siècle n’y a laissé que des traces quelquefois importantes, mais toujours peu remarquables.

À quoi cela peut-il être attribué ? Est-ce à la solidité des édifices romans construits avant et pendant le XIIe siècle, époque romane par excellence ? C’est possible ; et l’on conçoit alors que ces édifices ayant en eux de grandes conditions de durée, n’aient pas dû être remplacés de longtemps.

Mais une autre cause apparaît avec quelque probabilité.

Les Anglais, auxquels par erreur on a attribué longtemps la construction des plus magnifiques monuments qu’on admire dans la Guyenne et dans quelques provinces limitrophes, n’ont jamais pris part au mouvement qui s’est fait dans l’art au XIIIe siècle, dans ce qui était alors la France, c’est-à-dire le domaine royal. Peu artistes par nature, ils pratiquaient en Angleterre l’art roman que les Normands y avaient porté.

Maîtres de la Guyenne, de 1137 à 1453, ils y avaient trouvé des monuments à peu près semblables aux leurs ; ils s’en contentèrent ; ils purent en augmenter le nombre, mais ils les imitèrent seulement, et ne firent rien de grand, n’inventèrent rien.

La même marche s’observe en Angleterre, où l’art n’a pris un caractère de nationalité qu’au XVe siècle. Tous leurs grands édi-