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Page:Académie française - Recueil des discours, 1890-1899, 2e partie, 1900.djvu/350

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sant, pour peu que la force brute le laisse vivre, saura tôt ou tard la vaincre, la dominer et la conduire.


On comprend, Messieurs, que la science, qui, chaque jour, élève, agrandit et précise notre conception du monde, et qui transforme en même temps de plus en plus puissamment les conditions de notre existence en soumettant à nos lois la matière qui nous écrasait, inspire un enthousiasme presque religieux à ceux qui, frappés pour elle de cet immense amour chanté déjà par Virgile, se sont faits les ouvriers dociles de son œuvre toujours nouvelle.

Personne n’eut ce culte plus enraciné dans l’âme que M. Pasteur. Personne ne revendiqua plus hautement pour la science l’honneur et la place auxquels elle a droit, et ne s’indigna plus vivement contre la méconnaissance stupide qui lui refuse les moyens d’action dont elle a besoin. Dans un petit écrit intitulé le Budget de la science, publié en 1868, il adjurait ses concitoyens de prendre plus d’intérêt à « ces demeures sacrées que l’on désigne sous le nom expressif de laboratoires. Demandez, disait-il, qu’on les multiplie et qu’on les orne : ce sont les temples de l’avenir ; c’est là que l’humanité grandit, se fortifie et devient meilleure. » Il a eu la joie et le suprême honneur de voir s’élever sous son invocation, grâce à la munificence de la nation tout entière, le plus magnifique de ces « temples de l’avenir ». Il y repose aujourd’hui dans sa gloire, et autour de son tombeau s’est constitué, comme un Ordre des temps nouveaux, une milice vraiment spirituelle, qui combat sous sa bannière pour étendre ses conquêtes, et qui restera fidèle à la devise qu’il lui a donnée en travail-