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Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris III.djvu/123

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— Quelqu’un est-il blessé ? demanda-t-il.

— Non, répondirent les trois hommes d’une seule voix.

— Avez-vous rechargé vos revolvers ?

— Oui, monsieur.

— Eh bien ! retournons, et surtout attention.

La voiture tourna sur elle-même et reprit au grand trot le chemin qu’elle avait précédemment fait à toute course.

— Vous arrêterez devant l’église en construction, recommanda Bernard au cocher ; surtout, veillez bien, et ne tirez pas sans mon ordre.

— L’attaque a été vive, dit Charbonneau tout en mettant des cartouches dans ses revolvers.

— Bah ! pas trop ! fit Bernard en haussant les épaules assez dédaigneusement ; ce sont des maladroits et des poltrons qui n’entendent rien à dresser une embuscade ; ce ne sont même pas de véritables bandits ayant griffes et ongles ; leur plan était mal combiné ; il devait échouer. Nous n’avons eu affaire qu’à de misérables rôdeurs de barrières, des drôles accoutumés à jouer du couteau dans des rixes ignobles, mais ne sachant même pas se servir des revolvers qu’on leur a confiés. Pas un de leurs coups n’a porté.

— C’est vrai ; et cependant ils étaient au moins vingt ou vingt-cinq.

— Ils étaient davantage ; mais, quand même ils auraient été le double, leur coup n’aurait pas mieux réussi : la plupart étaient ivres ; ils avaient bu pour se donner du courage ; ils tiraient à tort et à travers, sans même viser, sans ordre, et, je vous le répète, sans plan d’attaque. Nous, nous n’étions que cinq hommes, mais sachant nous servir de nos armes, résolus, de sang-froid, et embusqués, comme dans une forteresse mobile, dans une voiture attelée d’un excellent cheval. Nous devions fatalement leur passer sur le ventre. C’est ce qui est arrivé.

— En effet, vous avez raison ; mais permettez-moi de vous faire observer, cher monsieur Bernard, que vous vous trompez.

— En quoi ?