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Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris III.djvu/73

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— Voyons qué que tu veux ! boulottes-tu ? J’ai d’ chouettes arlequins dont tu t’ lècheras les badigoinces.

— Merci, j’ai pas faim, j’ai dîné en ville chez un ambassadeur étranger, reprit-il plus ironique que jamais, donnez-moi un petit noir, ça me fera digérer en fumant ma bouffarde.

— T’attends donc quelqu’un ?

— Oui, un frangin avec lequel j’ai rendez-vous.

La Marlouze, voyant qu’elle ne tirerait rien du bandit, et qu’il s’obstinait à ne pas répondre à ses avances, en prit enfin son parti ; elle lui fit servir ce qu’il avait demande et ne s’occupa plus de lui.

Quant à Fil-en-Quatre, il s’adossa à la muraille, s’enveloppa d’un nuage de fumée et sembla se plonger dans de profondes et sérieuses réflexions.

Bientôt il fut oublié des autres consommateurs qui avaient commencé a causer entre eux.

Une vingtaine de minutes s’écoulèrent ainsi.

Puis, au moment où l’on y songeait le moins, la porte s’ouvrit, ou plutôt s’entre-bâilla, et une voix enrouée cria du dehors :

— Du flan !

Fil-en-Quatre, qui, depuis qu’il avait allumé son brûle-gueule, n’avait pas fait un mouvement, se redressa subitement, secoua les cendres de sa pipe sur le coin de la table, avala le contenu de son verre, remit son brûle-gueule dans la poche de son bourgeron, se leva et se dirigea vers la porte.

— Tu t’en vas ? lui demanda la Marlouze.

— J’ r’viens, attendez-moi, la mère, dit-il en riant.

Il sortit et referma la porte derrière lui.

— En voilà un drôle de coco, dit l’Ogresse à part soi ; qu’est-ce qu’il a donc ? il a l’air tout changé.

Cependant, Fil-en-Quatre avait rejoint un individu qui se tenait au milieu de la ruelle, les mains dans les poches.

— C’est toi, Loupeur ? dit-il.

— Un peu, répondit l’autre.

— T’entres pas ?