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Page:Alain - Le Citoyen contre les pouvoirs, 1926.djvu/181

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RÉPARER LES RÉPARATIONS

démie se soit refusé à toute discussion publique hors de France ; c’est qu’il n’aurait plus eu alors sa Garde Rouge ; il aurait dû entendre, alors, justement ce qu’il ne veut pas entendre. Il l’aurait entendu, et la foudre n’aurait pas frappé l’insolent. Il est moins pénible de lire ; on ne voit pas alors ce visage humain qui ose ; et les flatteurs autour, qui commentent en lisant avec les gestes de l’admiration et du dédain, restaurent la Majesté.

De l’autre part, des passions encore ; chacun prépare sa flèche ; et l’on voit que le Remplaçant a reçu une grèle de flèches. Les Russes ne sont que l’extrême gauche d’un Parlement européen où la droite manque. L’homme d’Académie y est seul et comme désarmé ; son regard cherche vainement les hurleurs de la Garde ; et quand il a dit deux ou trois fois : « Je ne tolérerai pas, j’y suis bien résolu », il doit entendre ; et que peut-il répondre ? « Si vous donniez Constantinople à la Russie, comme vous l’avez promis, nous rendrions aussitôt Constantinople à ses naturels occupants ? » C’est un mot bien aiguisé, mais qui est sans lien avec les intérêts réels. Il s’agit d’autre chose ; il s’agit de faire entendre au tyran des opinions justement qu’il ne veut pas entendre. De même il faut d’abord parler de désarmement, puisque le tyran ne veut pas qu’on en parle. Et voilà ce qu’il en coûte de vouloir exercer un droit de veto où l’on n’a point pouvoir.

La convention entre l’Allemagne et la Russie était une chose faite, d’ailleurs naturelle et prévisible. Mais ce qui n’était point prévu, c’est que les contractants sauraient d’abord n’en rien dire, et choisir le moment, comme s’ils avaient cherché l’occasion

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