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Page:Alain - Les Dieux, 1934.djvu/36

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veut moins énigmatique, c’est ce qui est évident en Pascal comme en Montesquieu, en Stendhal comme en Balzac. Ainsi les manières de parler qui se conservent se trouvent marquées de vrai, et déjà propres à soutenir le raisonnement et la description, par la syntaxe et par le vocabulaire. Mais le beau n’y importe pas moins ; on le sent dans la prose, toutefois sans se rendre compte aisément de cette autre vérité, implicite, et aussi inexprimable que la plastique, qui résulte des sonorités et des flexions. En revanche ces gestes du gosier et de tout le corps, autant qu’ils expriment l’équilibre humain et l’harmonie entre l’homme et les choses, sont presque tout dans la poésie, qui ne cesse pas de rajeunir des pensées trop connues par une manière toujours neuve d’y accorder l’attitude viscérale. Le beau, encore une fois, est un fidèle témoin du vrai, et qui anticipe sur le vrai. Ajoutons que la poésie, avant même l’écriture et la lecture, contribue puissam-