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Page:Alain - Les Dieux, 1934.djvu/85

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seulement, avançant d’un pas sur son idée, comparer l’aveugle travail, qui sent le poids du monde sur l’outil, avec la facile contemplation du spectacle coloré qui change d’instant en instant par de trop faciles mouvements. Le voyage, il est vrai, est un travail, quoiqu’on se laisse souvent voiturer. Mais en considérant même le cas le plus favorable d’un explorateur ou d’un grimpeur, où le travail senti accompagne toujours les changements du spectacle, on remarquera qu’il n’y a point de proportion entre le travail et le changement ; il reste du merveilleux ici, et une apparence qui rappelle les contes. Et au contraire le travail aveugle, d’un bout à l’autre du champ, ne cesse de payer un changement stable, où l’on s’établit pour le continuer. Il n’y a point soupçon d’idéalisme, alors, parce que ce qui est senti en cet échange qui se fait entre les reins, les bras, l’outil, et la terre résistante, c’est bien le terme antagoniste, fortement lié en toutes ses parties,