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Page:Alain - Lettres à Henri Mondor, 1924.djvu/20

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LETTRES D’ALAIN

plus agréables ont quelque chose d’offensant ; c’est pourquoi l’esprit les laisse à elles-mêmes ; d’où elles redescendent toujours à l’animal, mais déréglé. Un cœur généreux ne peut manquer d’en être agité souvent, par l’effet des signes et des politesses ; mais ou bien il les efface par les mouvements de la vie active, ou bien il les reprend et les ordonne en les rapportant à un seul objet ; et c’est ce que l’on appelle sentir, et encore mieux ressentir. Comme on voit par le mot sublime de Juliette dès qu’elle a vu Roméo : « Si je n’épouse pas celui-là, je mourrai vierge. » Bref, m’accordant ici avec le sentiment universel, je prononce que c’est toujours par quelque serment que les émotions sont relevées au niveau du sentiment. Or rien n’est plus libre que le serment ; rien ne représente mieux cette police de soi, dirigée contre l’instabilité naturelle de