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Page:Alain - Minerve ou de la Sagesse, 1939.djvu/90

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MINERVE OU DE LA SAGESSE

fois de plus cette justice du monde aveugle, qui n’est point justice, qui est plutôt ajustement. Les chocs sont amortis, la fatigue endort ce qui reste des combattants, les forces sont nouées, ce que vous appelez paix ; cependant une flèche folle a gardé l’élan, rebondissant ici et là, jusqu’à frapper le maître de force. Et si cette âme a compris, sa vie prochaine sera bien plus belle. »

Tout se passe comme si les Dieux gouvernaient le monde. Mais il faut pourtant savoir aussi que cela n’est pas ; car si cela était l’esprit ne serait pas en péril ; l’homme n’aurait rien à garder, rien n’étant en péril. Si l’on veut donc garder son esprit, il faut se donner le spectacle, comme faisait Platon, c’est-à-dire comprendre que tous ont choisi et reçoivent les conséquences de leur choix. Et il est pourtant bien vrai qu’il faut contempler ainsi les perspectives du Temps, afin de découvrir un peu les perspectives de l’esprit. Car l’esprit éternel pense le temps sous la loi d’éternité ou de recommencement. Un esprit ne peut se penser mort. Ainsi sont créés les Champs Élysées d’esprit.

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