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Page:Alain - Onze Chapitres sur Platon, 1928.djvu/105

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Tous les anciens nomment ombres, après Homère, ces âmes qui ont vécu et qui ne sont pas tout à fait mortes. Or, par la Caverne, nous savons ce que ce sont que des ombres. Il se trouve qu’entre les mythes Platoniciens, celui-là signifie exactement ce que nous sommes, ce que nous pensons, et ce que nous sauvons par l’intelligence dans cette présente vie. L’évasion, on l’a compris, n’est que métaphore. Les idées sont la vérité des ombres, et en elles. L’imagination est réduite par l’autre sens de cette parabole étonnante, où, parce que chaque terme matériel a un sens intellectuel bien déterminé, il ne reste plus rien à croire, sinon que le penser sauve tout le croire. Ainsi il n’y a point de risque. Il n’y a point de caverne, ni de carcan ; il n’y a qu’un homme que l’on éveille. C’est un autre monde, et c’est toujours le même monde. Ciel des idées, idées descendantes, et d’abord transcendantes, tout cela n’est que métaphores ; le lieu convient aux ombres. Le détour mathématique se fait sans un mouvement du sage, par un refus seulement des ombres, et puis par une ré-