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Page:Alain - Onze Chapitres sur Platon, 1928.djvu/164

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prose. En conclusion de La République, tout est mis au clair, et tous les temps sont rassemblés en un moment éternel.

Et, c’est l’homme qui y est allé voir. Pris pour mort, conduit chez Pluton, reconnu vivant et ramené, il raconte ce qu’il a vu là-bas. Ce qu’il a vu ? Le spectacle d’abord de la nécessité, et les vrais fuseaux des Parques, qui sont les sept orbites des corps célestes selon la loi. Mais surtout un jugement étrange, et qui commence par une grande voix qui dit : « Dieu est innocent. » Après cela, devant les âmes qui vont revivre, sont jetés des sorts sur la prairie, qui sont comme des paquets ; ici une tyrannie, avec tout ce qui l’accompagne, soupçons, mort violente, et le reste ; là, une vie d’agriculteur, utile, ignorée, occupée ; et ainsi toutes sortes de destins. Les âmes sont invitées à choisir selon un ordre de hasard. Mais n’ayez crainte ; s’il se trouve une âme sage parmi les dernières, elle trouvera encore un bon destin ; car presque toutes choisissent mal. Et comment autrement, puisque le plus souvent elles n’ont point l’expérience d’une vie humaine ? Comme dira Aristote, c’est