Aller au contenu

Page:Alain - Onze Chapitres sur Platon, 1928.djvu/41

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 39 —

donc idée d’idée, et alors quand penserons-nous ? Quel terme fixe, quel point de secours et de certitude, si nous nous laissons aller à penser ce que presque tous pensent, à savoir que les idées ressemblent aux choses, et sont comme des modèles dont les choses seraient d’imparfaites copies ? En vérité ce monde des idées est aussi fuyant que l’autre. On y soupçonnerait une sorte de mouvement et de génération. Mais quoi de plus absurde, en ces pensées de Dieu ? Au reste ce monde supérieur se suffit à lui-même, et il le faut bien. Ce qui a rapport à l’essence du maître, c’est l’essence de l’esclave, et non point l’esclave ; en revanche l’esclave ici n’est point l’esclave d’une idée, comme serait l’essence du maître ; mais il est l’esclave d’un maître de chair, soumis comme lui au changement de toutes les choses périssables. Par cette même raison l’idée de commandement suprême, qui est celle de Dieu, ne peut commander ici, de même que l’idée de savoir suprême, qui est encore celle de Dieu, ne peut savoir ici. Immenses difficultés, connues, éprouvées, épuisées par la plupart de