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Page:Alain - Onze Chapitres sur Platon, 1928.djvu/50

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nons pourtant que c’était une première réflexion. L’esprit se retire des choses et cherche ses propres lois. Il ne trouve rien de solide ; il se moque ; il rit. C’est quelque chose de rire ; et ce qui fait rire a paru digne encore de ce beau nom d’esprit. Si l’on veut se garder ici de trop de sérieux, il faut lire, avant le Parménide, l’Euthydème, qui est une bouffonnerie sans malice, où l’on trouve des raisonnements comme celui-ci : ta chienne a des petits ; elle est mère ; elle est tienne ; donc elle est ta mère. Socrate ne fait que rire devant ces grossières apparences ; on ne réfute point ce qui n’est que jeu de mots. Toutefois je soupçonne que l’art profond et toujours très caché de Platon veut ici nous faire entendre qu’en d’autres sujets, et quand la conclusion nous plaît, nous savons bien faire arme de raisonnements qui ne valent guère mieux que celui-là. On verra, par d’autres exemples, que Platon excelle à faire entendre, sous l’apparence d’un simple jeu, ce qu’il importe le plus de savoir. On se demande si Platon n’aurait point pesé et jugé cette logique du prétoire, qui prouve si aisé-