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Page:Alain - Onze Chapitres sur Platon, 1928.djvu/61

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thématiciens le savent bien. Une formule n’est pas seulement commune à tous les problèmes qu’elle permet de résoudre ; elle est propre aussi à chacun d’eux. Par exemple, toutes les variétés possibles dans la vitesse de plusieurs coureurs, dans le sens de leurs mouvements, dans le temps et le lieu de leurs rencontres, une seule formule les peut exprimer. C’est pourquoi, en disant que les formules sont générales, on ne dit point tout, on ne leur prête que l’identité immobile de l’idée du lion, commune à tous les lions. Une telle idée ressemble à la chose ; elle est elle-même une sorte de chose ; elle est semblable à d’autres idées, différente d’autres idées ; elle forme avec toutes les autres idées un autre monde d’existences qu’il faut dire imaginaires, et qui, par le même raisonnement, en suppose un autre et un autre, et ainsi sans fin. Toujours est-il que, par le rapport extérieur que l’imagination emporte avec elle, ces idées se séparent et même s’envolent ; elles sont quelque part là-haut ; elles sont transcendantes. Attention ici. La métaphore est presque partout dans Platon ; elle