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Page:Alain - Onze Chapitres sur Platon, 1928.djvu/66

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voir ce que savent nos docteurs. Toujours est-il qu’Aristote nous rapporte de lui qu’il considérait les nombres comme des intermédiaires entre les choses et les idées. Platon avait donc l’expérience de cette réflexion intrépide, qui toujours dépasse, qui toujours dépose l’objet, même abstrait, de ce rang d’idée auquel il prétend toujours, par notre nature mêlée de terre. Et puisque ce retour à l’opinion vraie, cette descente, cette chute d’entendre à voir, est notre lot, l’autre mouvement, si difficile qu’il soit, et souvent sans moyens, comme je disais pour les nombres, est pourtant le mouvement vrai. Comme disait un mathématicien « Nous jetons du lest ; nous ne pouvons pourtant pas nous jeter nous-mêmes. » En ce mouvement tient peut-être toute la doctrine de l’idée. Platon, en ses Dialogues, a divinement trouvé ce qu’il nous faut, par cette admirable insuffisance que ses mythes nous jettent au visage.

Si l’on demande maintenant quel est l’ordre vrai, non pas dans ces reflets que sont les notions mathématiques, mais dans les