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Page:Alain - Système des Beaux-Arts.djvu/223

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CHAPITRE VIII

DE L’ARCHITECTURE POPULAIRE

Il y a une architecture populaire comme il y a une musique populaire. Les architectes de chez nous n’ont jamais fait que copier les maisons, quand ils ne copiaient pas le grec ou le romain. De même, dans l’Italie du Nord, il est assez clair que les palais imitent les chaumières, par les terrasses, les colonnades et la recherche de l’ombre. Il est raisonnable de conclure qu’en tout pays l’architecte a toujours copié ce qui avait duré et ce qui plaisait, en essayant seulement de faire plus grand et plus solide. C’est donc le maçon qui a créé les formes ; et, parmi les belles formes, la plus belle est sans doute le cintre, forme naturelle du pont et de l’aqueduc, suggérée déjà par les cavernes creusées et par les cavernes naturelles, qui vont toujours à cette forme-là, par l’usure ou l’écroulement de ce qui ne la suit point. Ainsi la forme de la nef romane, qui est peut-être encore maintenant la plus belle, résultait des procédés et des coutumes du métier. Aussi une pensée de piété n’avait point à inventer des formes, comme on voudrait dire, mais seulement à fournir de l’argent et des pierres, de façon que l’édifice fût plus haut et plus vaste que tous ceux des alentours. J’aperçois deux conditions qui pouvaient modifier peu à peu les