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Page:Alanic - Les Roses refleurissent.pdf/294

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avoir amené l’hôte qui m’est arrivé tantôt. Vous m’y aviez d’ailleurs autorisé ! M. Renaud Jonchère, l’un de nos plus brillants collaborateurs…

— Et le poète exquis de la Péri, roucoula Mme Dalyre d’une voix pâmée. Ah ! monsieur, quelle joie pour nous tous de vous connaître !

Recevoir chez elle un potentat de la presse, un auteur applaudi au Français et sur le boulevard ! La tête lui tournait d’orgueil. Elle se croyait presque une nouvelle Arthénice, tandis qu’elle procédait aux présentations.

— M. Jonchère — Mme Vincent Marcenat, ma belle-sœur, — Mme Lucien Dalyre, ma belle-fille.

Estelle, droite sur son fauteuil, gardait un maintien tranquille. Certes, dans le premier sursaut de cette rencontre inouïe, toute pensée s’était anéantie en elle. Mais son regard qui vaguait alors, éperdu, distingua, au fond du salon, deux prunelles d’un bleu cru qui la dévisageaient, deux yeux de flamme pâle, luisant dans la pénombre comme ceux d’un méchant chat. Elle eut conscience que quelqu’un désirait jouir de son trouble. Cette idée la cingla d’un coup de fouet salutaire, ranimant sa fierté et son courage. Elle fit face à l’attaque, le front haut.

D’un imperceptible signe de tête, Mme Marcenat répondit au salut qui courbait, devant elle, le poète visiblement embarrassé. Il passa, sans se