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Page:Alexis - La Fin de Lucie Pellegrin, etc, 1880.djvu/171

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LES FEMMES DU PÈRE LEFÈVRE.

lon ; quand il veille à la place du garçon, le père Brun veut de l’argent… J’ai bien quarante sous !

Le Polaque tourna le roi. Et, imperturbablement :

— Je te passe cent quatre-vingt-sept francs… Moi, il me reste dix sous, pour du tabac, demain matin.

Le pauvre Mauve, de Toulon, le bras déjà levé pour défoncer le tapis vert du coup de poing du désespoir, se retint. Une idée ! Chut ! Une bonne farce à faire au cafetier endormi ! Elle serait bien un peu raide par exemple, celle-là. Bast ! deux jours seulement sans remettre les pieds au café, et le cafetier aurait le temps de se calmer. Un si bon homme, d’ailleurs, ce « père Brun » avec sa tête vénérable ! Un grognon à la vérité, tannant les derniers jours du mois, marquant à la fourchette sur les comptes : à part cela, un père pour sa clientèle.

— Polaque, un crayon ?

Un crayon, oui ! le Polaque avait un crayon à lui prêter. Déjà, Mauve, de Toulon, quelques mots écrits, et le bout de papier bien en vue, au milieu d’une table, retenu par un pyrophore, se levait sans bruit avec le Polaque. Au Divan, le père Brun dormait toujours de son beau sommeil, tandis que les deux étudiants, étouffant leurs pas, se tenant les côtes pour ne pas éclater de rire, étaient déjà au fond des Momies. Plus que l’espagnolette d’une petite porte à soulever avec précaution ; puis, dans quelques minutes, quand on aurait rejoint la bande, on aurait la joie de raconter cette fuite aux Coqs, à ceux des