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Page:Alexis - La Fin de Lucie Pellegrin, etc, 1880.djvu/286

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JOURNAL DE MONSIEUR MURE.

Il y avait beaucoup de monde : les membres du cercle où allait Derval, des magistrats, des officiers en retraite, l’indispensable M. de Lancy et son fils ; — tous indifférents et curieux. J’avais fait la leçon à l’arrière-petit-cousin ; et, en distribuant des poignées de main, nous répondions aux interrogations muettes, que « madame Moreau » très gravement malade n’avait pu venir. Leur curiosité satisfaite, la plupart n’allèrent même pas jusqu’à l’église. À la porte du cimetière, le petit-cousin, très pâle, prit brusquement congé de moi, en me remerciant de ce que j’avais fait pour « son parent », moi, un simple ami : mais lui, depuis dix-sept ans déjà, n’avait plus mis les pieds dans un cimetière ! il fallait l’excuser s’il partait ! la vue des tombes lui faisait mal, c’était vraiment plus fort que lui ! Quand les soldats et le prêtre des morts se furent également retirés, je restai seul. Et, à chaque pelletée de terre des fossoyeurs tombant sourdement sur la caisse, je me disais : « Où est sa fille !… Pourquoi n’est-elle pas venue ?… Que fait-elle à cette heure !… »

Le lendemain soir, au cabinet de lecture, l’Officiel à la main, au lieu de lire la séance orageuse de l’Assemblée nationale, je me livrais à des suppositions baroques. « M. de Vandeuilles est-il homme à avoir supprimé mes dépêches ? » Tout à coup, ce fut un trait de lumière ! « L’an dernier, à pareille époque, le commandant ne m’a-t-il pas parlé du Tréport, où Hélène faisait prendre des bains de mer à sa