Aller au contenu

Page:Alexis - La Fin de Lucie Pellegrin, etc, 1880.djvu/60

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
48
LA FIN DE LUCIE PELLEGRIN

tres, je vous avais vu entrer ; mais avant de monter, j’ai voulu vous laisser rigoler un peu… Et toi, la bête, la crevée, t’imagines-tu que j’ai la berlue… Au lieu de te laisser toujours chipper tes frusques par ta tante, et d’envoyer la vieille mettre au clou ton dernier diamant, n’aurais-tu pas mieux fait de sauver au moins tes candélabres du gros Victor, cette canaille que tu as nourri et que tu as établi…

L’autre Adèle, penchée cette fois à l’oreille de la grande Adèle, demandait de nouveau tout bas :

— Qu’est-ce donc que Chochotte ?

La grande Adèle répondit à demi-voix :

— Chochotte… Lucie Pellegrin l’a toujours entretenue sur un pied de vingt francs par jour… Chochotte, c’est une…

Et elle dit le mot à haute et intelligible voix.

Le reste ne fut qu’un éclair. Chochotte déjà pendue au chignon de la grande Adèle, tapait, ruait, égratignait, mordait. Toutes se précipitèrent, il y eut une mêlée générale, des coups, des hurlements ; et la table s’était renversée dans la bagarre, inondant la chambre de verre cassé, de liqueur, de tisane, de bière, d’huile de foie de morue. Miss éveillée en sursaut, toute trempée sur son édredon, remonta en hâte sur le lit. Puis, ce fut tout. Se bousculant dans le couloir, dégringolant l’escalier, se menaçant de la police dans la rue, la rixe était allée se continuer ailleurs. Elles n’étaient plus là, ni Chochotte, ni les deux Adèle, ni Marie la frisée, ni Héloïse, ni madame Printemps.